mardi 13 janvier 2009

Guerre de Gaza sur le net : à qui profite l'image ?

Trous d'obus contre corps sanglants. Images, interprétations et contre-interprétations s'affrontent sur le net, qui est devenu le second front, virtuel celui-ci, de cette guerre.

Emblématique de la confusion qui règne sur la toile entre pro-palestiniens et pro-israéliens, cette vidéo, postée sur youtube en août 2006. Un homme agrippe un enfant par le bras et le traîne à l'écart, d'un groupe d'hommes armés à un autre. La vidéo s'intitule "Armed palestinian terrorists using children as human shield" (des Palestiens armés utilisent des enfants comme boucliers humains).



(La vidéo existe dans de nombreuses versions dont certaines ont été retirées de youtube, il est donc possible que celle que nous publions disparaisse prochainement)

La vidéo sert manifestement le discours israélien, accusant les terroristes palestiniens, notamment du Hamas, de sacrifier des enfants. Dans les commentaires laissés par les internautes, majoritairement pro-palestiniens, deux visions s'affrontent : soit le titre reflète effectivement le contenu, soit cela montre juste un homme écartant un enfant de la ligne de tir.

Or cette vidéo, qui aurait pu tomber dans l'oubli, est revenue sur le devant de l'écran avec le déclenchement de l'offensive israélienne et la recrudescence de la propagande des deux côtés. Elle a ainsi circulé sur Facebook et des sites pro-israéliens l'ont mise en exergue.

Interprétations, contradictions

Côté pro-israélien, les lectures sont parfois embrouillées. D'après le site canadien pro-israélien "Point de bascule", cette vidéo figurerait des enfants placés en exprès en ligne de mire, pour les faire tuer et in fine en faire des martyrs "dans le but d’attirer la sympathie internationale pour la cause palestinienne et la condamnation d’Israël". Difficile de déterminer à qui profite l'image.

Dans d'autres vidéos, tout aussi ambiguës, ce sont les soldats israéliens qui sont accusés de prendre des enfants comme boucliers humains. Là encore, le titre est plus fort que l'image.

Pour François Jost, interviewé par 20minutes.fr, les Palestiniens gagnent la guerre des images, car c'est à Gaza qu'on voit des victimes, tandis que les images impersonnelles qui nous parviennent d'Israël ne sont pas de nature à attirer autant de sympathie. Or "la vérification et la prise de distance avec ces images sont souvent secondaires dans les conflits vécus de manière aussi passionnelle", explique le directeur du centre d'études sur les images et les sons médiatiques.

Surabondance d'images ne nuit pas

Acrimed ne l'entend pas de la même oreille. L'observatoire des médias sur le net, plutôt enclin à soutenir les Palestiniens, considère que la surabondance de reportages à Sderot (les journalistes ne pouvant passer la frontière), et l'absence de témoignages palestiniens contribuent à légitimer l'offensive israélienne.

D'autres images que celles des explosions et des corps des victimes sont relayées sur les écrans : les manifestations de soutien à Gaza ou aux Israéliens se multiplient en Europe et aux Etats-Unis, charriant avec elles l'éternelle guerre des nombres entre police et organisateurs. Des images qui sont parfois vues par le petit bout de la lorgnette : focalisations sur des militants pro-palestiniens qui appellent à la destruction d'Israël, ou sur des élus politiques présents à une manifestation pro-israélienne et absents des manifestations pro-palestiniennes, etc.

Pour un point de vue israélien sur la guerre médiatique, voir l'interview d'Ouriel Ohayon.

Julie Jammot

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